Vous qui m’aiderez dans mon agonie,
Ne me dites rien ;
Faites que j’entende un peu d’harmonie,
Et je mourrai bien.
La musique apaise, enchante et délie
Des choses d’en bas ;
Bercez ma douleur ; je vous en supplie,
Ne lui parlez pas.
Je suis las des mots, je suis las d’entendre
Ce qui peut mentir ;
J’aime mieux les sons qu’au lieu de comprendre
Je n’ai qu’à sentir :
Une mélodie où l’âme se plonge
Et qui, sans effort,
Me fera passer du délire au songe,
Du songe à la mort.
(fragment)
Sully Prudhomme
Quitter ce monde-ci ? Mais pour quel avenir ?
Cette existence de l’au-delà, quelle est-elle ?
Je voudrais m’en aller. Mais serait-ce en finir ?
Mon emmerdeuse d’âme est peut-être immortelle.
Tristan Bernard
Ah ! tout cela, jeunesse, amour, joie et pensée,
Chants de la mer et des forêts, souffles du ciel
Emportant à plein vol l’Espérance insensée,
Qu’est-ce que tout cela, qui n’est pas éternel ?
Soit ! La poussière humaine, en proie au temps rapide,
Ses voluptés, ses pleurs, ses combats, ses remords,
Les Dieux qu’elle a conçus et l’univers stupide
Ne valent pas la paix impassible des morts.
Leconte de Lisle
extrait
[…] de l’enfer il ne sort
Que l’éternelle soif de l’impossible mort.
Agrippa d’Aubigné
(source : « Les Tragiques »)