Mon âme m’avertit de fuir Héliodore
Sachant que cet amour me causera du tort.
Or, m’enfuir, je ne puis et mon âme elle-même,
L’effrontée, tout en me prévenant, l’aime encore.
Méléagre de Gadara
J’étais à toi peut-être avant de t’avoir vu.
Ma vie, en se formant, fut promise à la tienne,
Ton nom m’en avertit par un trouble imprévu,
Ton âme s’y cachait pour éveiller la mienne.
Je l’entendis un jour et je perdis la voix,
Je l’écoutai longtemps, j’oubliai de répondre.
Mon être avec le tien venait de se confondre,
Je crus qu’on m’appelait pour la première fois.
Marceline Desbordes-Valmore
Parthénice, il n’est rien qui résiste à tes charmes :
Ton empire est égal à l’empire des dieux ;
Et qui pourrait te voir sans te rendre les armes,
Ou bien serait sans âme, ou bien serait sans yeux.
[…]
Ce fut alors que voyant ton mérite adorable,
Je sentis tous mes sens t’adorer tour à tour :
Je ne voyais en toi rien qui ne fût aimable
Je ne sentais en moi rien qui ne fût amour.
Jean Racine
Extrait
Baise-moi encore, rebaise-moi et baise,
Donne m’en un de tes plus savoureux,
Donne m’en un de tes plus amoureux,
Je t’en rendrai quatre plus chauds que braise.
Las, te plains-tu ? Çà, que ce mal j’apaise
En t’en donnant dix autres doucereux.
Ainsi mêlant nos baisers tant heureux,
Jouissons-nous l’un de l’autre à notre aise.
Louise Labé
Extrait du sonnet XVIII.
Je vis, je meurs, je me brûle et me noie,
J’ai chaud extrême en endurant froidure,
La vie m’est trop molle et trop dure,
J’ai grands ennuis entremêlés de joie.
Tout à coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j’endure,
Mon bien s’en va, et à jamais il dure.
En même temps je sèche et je verdoie.
Louise Labé
Extrait du sonnet.